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Comment se font les votes au Parlement européen et dans d’autres institutions européennes ?

En France nous élisons nos députés au suffrage universel uninominal (on vote pour une personne et non pour une liste) à deux tours : pour être élu au premier tour il faut obtenir la majorité absolue des suffrages exprimés, à condition de réunir un nombre ou un pourcentage minimal d'électeurs inscrits.

Au Royaume-Uni ou aux États-Unis c’est différent : les députés sont élus au scrutin uninominal à un seul tour, celui qui a obtenu le plus de vois est élu.

Les députés européens, eux, sont élus au scrutin de liste à la proportionnelle : pour la France chaque liste comporte 81 noms, si une liste recueille par exemple 23 % des voix elle aura un nombre de députés égal à 23 % de 81, soit 19.


Source : Istockphoto


Bon d’accord, mais une fois élus, comment ces députés européens vont-ils eux-mêmes voter lors des sessions du Parlement européen ? Et plus largement comment sont votées les « lois » européennes, sachant que le Parlement européen, qui représente les citoyens européens, ne décide pas seul : les textes doivent être votés dans les mêmes termes par le Conseil de l’Union européenne, qui représente les États de l’UE par le truchement des 27 ministres du domaine concerné par le projet de texte (agriculture, transports, environnement, etc.) ?

Et comment sont adoptées les grandes orientations données par le Conseil européen, qui réunit les chefs d’État ou de gouvernement des 27 États membres de l’UE ?


Au Parlement européen, c’est simple : après des négociations et mises au point en commission, le texte est présenté et voté en session plénière, à la majorité simple des votants. Il peut bien sûr être rejeté, également à la majorité simple. La décision adoptée est celle qui a recueilli le plus de voix.

 

Au Conseil de l’Union européenne, c’est moins simple. Pour la grande majorité des décisions, le vote se fait (depuis novembre 2014) à la majorité qualifiée : le texte est approuvé si plus de 55 % des 27 États membres (soit 15) ont voté pour, à condition qu’ils représentent à eux tous au moins 65 % de la population totale de l’UE. Si un texte est rejeté, il doit l’être par au moins 4 États membres. Ces dispositions évitent à la fois une domination écrasante par les États les plus peuplés (l’Allemagne et la France totalisent à elles deux presque 34 % de la population de l’UE) et une possibilité de blocage par quelques « petits » États.


Quelques décisions, relevant de domaines particuliers, doivent cependant être adoptées à l’unanimité ; c’est le cas notamment de la fiscalité.

 

Au Conseil européen, c’est moins formel : les orientations sont adoptées « par consensus », c’est-à-dire que personne ne s’y oppose, ou dit autrement que tous jugent la décision acceptable. Une forme d’unanimité atténuée… C’est ainsi que, récemment, concernant une aide à l’Ukraine, on a vu le premier ministre hongrois Viktor Orban sortir de la salle au moment du vote… Du vaudeville à la Feydeau…

 

Finalement, faudrait-il étendre plus largement les votes à la majorité qualifiée ?

C’est en tout cas ce qui ressortait de la consultation des citoyens européens lors de la « Conférence sur l’avenir de l’Europe » en 2021.

Avec l’unanimité, plus il y a d’États membres, plus il devient probable qu’un de ces États ait des raisons ou des prétextes pour bloquer une décision, par exemple avec l’objectif d’obtenir un avantage s’il renonce à ce blocage. La Hongrie a ainsi plusieurs fois fait un véritable chantage à l’UE pour obtenir le déblocage de plusieurs milliards d’€ de fonds européens destinés à son pays mais gelés par la Commission européenne en raison des manquements à l’état de droit reprochés à Budapest.

Le fonctionnement du Conseil de sécurité de l’ONU est un exemple criant : chacun des 5 membres permanents du Conseil de sécurité (Chine, France, Royaume-Uni, Russie, USA) peut exercer un veto, et il est bien rare que les intérêts de la Russie ou de la Chine et ceux des USA coïncident… On parle donc peu des 10 autres membres, non permanents, élus pour 2 ans : eux n’ont pas l’arme du veto.


Exiger l’unanimité de tous, c’est donner un droit de veto à chacun et empêcher l’ensemble d’avancer, au détriment de la démocratie et de l’intérêt général. A 27 c’est déjà parfois le cas, mais avec les élargissements en perspective pour l’UE cela ne fera que s’accentuer.

« Petite » difficulté : pour changer les modes de vote actuels, il faudra certainement… l’unanimité ! Et de fortes pressions des citoyens européens.

                                                                                                                       

Jean-Jacques Smedts


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