Le Parlement européen favorable à des sanctions contre la Hongrie
Mercredi 12 septembre, les députés européens ont voté pour le déclenchement d'une procédure de sanctions à l'égard de la Hongrie, conformément à l'article 7 du traité sur l'Union européenne (TUE). Pour la première fois, le Parlement a pris l'initiative en la matière, estimant qu'il y avait en Hongrie un "risque clair de violation grave" des valeurs fondatrices de l'Union européenne. Si le vote reste symbolique, il a néanmoins obligé la droite européenne à clarifier ses positions sur la Hongrie.
Par ce vote - 448 voix pour, 197 contre et 48 absentions, la majorité des deux tiers était nécessaire - le Parlement européen demande aux États membres (le Conseil de l'UE) de confirmer l'existence d'un "risque clair de violation grave" par la Hongrie des valeurs de l'Union européenne: le respect de la dignité humaine, la liberté, la démocratie, l'égalité, l'État de droit ainsi que le respect des droits de l'homme. Le rapport de la députée verte Judith Sargentini (Pays-Bas) qui a été adopté détaille les préoccupations du Parlement à l'égard de la situation en Hongrie. Celles-ci portent notamment sur l'indépendance de la justice, la liberté d’expression, la corruption, le droit des minorités et la situation des migrants et des réfugiés.
Le vote des députés du PPE (Parti populaire européen, droite), groupe parlementaire dont est membre le Fidesz, parti du Premier ministre hongrois (12 eurodéputés), a été particulièrement scruté: l'Allemand Manfred Weber, président du groupe et candidat déclaré pour la présidence de la Commission européenne à partir de 2019, n'avait pas donné de consigne de vote, mais a lui-même voté en faveur du rapport. Résultat pour le PPE: 116 voix pour, 57 contre et 28 abstentions. La "famille" PPE n'avait jusqu'alors jamais clairement remis en question les positions anti-migrants et anti-UE de Viktor Orbán, représentant de "l'illibéralisme" en Europe, ni ses atteintes à l'Etat de droit. Les eurodéputés français membres du PPE ont eux-mêmes été très divisés dans leurs votes.
Un vote qui restera probablement symbolique
Le Conseil de l'UE doit à présent se saisir de la procédure et constater, à la majorité des quatre-cinquièmes (le pays concerné ne vote pas), s'il existe bien un risque clair de violation des valeurs fondatrices de l'UE. S'il confirme ce risque, après avoir entendu la Hongrie, le Conseil devra vérifier régulièrement si les motifs de ce constat sont toujours valables.
Cette procédure, parfois qualifiée "d'arme nucléaire", aboutit aux sanctions les plus sévères que l'UE puisse adopter à l'encontre de l'un de ses membres. Si les violations persistent, l'article 7 mentionne que certains droits de vote du pays en question au sein du Conseil peuvent être suspendus.
Malgré cela, le vote du Parlement européen du 12 septembre demeurera probablement symbolique car la procédure, longue et complexe, nécessite à l'issue du processus (article 7.2 du TUE) un vote à l'unanimité (sans le pays visé) du Conseil européen (réunion des chefs d'Etat ou de gouvernement). Il est donc difficile de savoir si cette pression exercée par l'UE sur le gouvernement hongrois sera efficace.
C'est la seconde fois que l'article 7 est activé en moins d'un an. En décembre 2017, c'était la Pologne qui était visée, avec une procédure enclenchée par la Commission européenne. La Hongrie avait alors fait savoir qu'elle s'opposerait à toute sanction contre la Pologne, il est donc probable que la Pologne lui renverra l'ascenseur si nécessaire: l'unanimité au Conseil européen lors de la dernière étape de la procédure est donc très loin d'être acquise!