Editorial : Le véritable enjeu des élections européennes
Les prochaines élections européennes seront à la fois passionnantes et cruciales. Passionnantes car les enjeux seront à la fois clairs et importants. Il s'agit ni plus ni moins que de choisir entre deux modèles d'Europe : soit une Europe fermée à l'immigration dominée par les « démocraties il-libérales », soit une Europe ouverte ou entrouverte à l'immigration et conduite par des partis traditionnellement libéraux (au sens politique du terme).
Cruciales car il se pourrait que les partis europhobes et eurosceptiques obtiennent une minorité de blocage, paralysant ainsi le fonctionnement du Parlement européen.
Le contrôle de l'immigration est l'enjeu apparent, celui sur lequel vont se décider beaucoup d'électeurs ; sur ce point, une majorité d'entre eux risquent de choisir le rejet de l'immigration. De toutes les façons, la différence des politiques menées dans ce domaine sera faible : déjà, les gouvernements libéraux au pouvoir ont refermé la porte à l'immigration et demain aucun gouvernement il-libéral ne sera jamais en mesure de verrouiller complètement les frontières : le changement apparent sera dans la rhétorique, plus ou moins agressive et dans les méthodes, plus ou moins brutales. La réalité sera que l'immigration continuera par les interstices des frontières comme l'eau d'une rivière que des enfants essayent de barrer avec des cailloux.
Par contre, il y a un enjeu moins évident : accepterons-nous de remettre les clés du pouvoir à des hommes « providentiels » qui rejettent les contre-pouvoirs (justice indépendante, cour constitutionnelle, médias indépendants....) au nom du refus de « l'impossibilisme légal » qui les empêche de remodeler la société selon leurs normes. Pour ces hommes, lorsque le peuple les a portés au pouvoir, plus rien ne doit s'opposer à la volonté populaire (telle qu'elle est définie par le chef) : contre-pouvoirs, opposition, O.N.G., universités libres, Union européenne sont par avance disqualifiés comme étant représentants des élites corrompues et donc ennemis du peuple.
Trump et Poutine ne manqueront pas de leur prêter main forte pour essayer de démanteler l'Union ; en effet, la légende des Horaces et des Curiaces doit nous rappeler que chacun de nos pays pris séparément ne tiendrait pas longtemps face à ces deux personnages qui sont prêts à utiliser tous les moyens : pressions commerciales imposées par l'un, déstabilisation de nos sociétés tramée par l'autre.
Donc, le 26 mai 2019, choisissons nos députés en fonction de l'enjeu réel, votons avec notre tête et pas avec nos tripes.
Frédéric BOURQUIN, président de la Maison de l'Europe